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today6 août 2025
Quand on pense à Ginny & Georgia, difficile de ne pas avoir d’abord en tête une série pop, colorée, taillée pour les ados Netflix. Et pourtant, sous cette carapace de série “feel bad feel good”, se cache une œuvre bien plus dense, poignante et finement écrite. Trois saisons plus tard, Ginny & Georgia n’est pas seulement un succès populaire : c’est un miroir tendu à toutes les générations, une leçon d’humanité à coups de répliques bien senties, de silences qui parlent fort, et de regards qui en disent long.
Créée par Sarah Lampert et lancée en 2021 sur Netflix, Ginny & Georgia s’annonçait d’abord comme une version moderne de Gilmore Girls, en plus edgy. Une mère un peu trop jeune, une fille un peu trop mature, une petite ville qui cache ses secrets… on connaît la chanson. Sauf que très vite, la série déjoue les attentes. Georgia (incarnée par l’incroyable Brianne Howey) n’est pas une maman comme les autres : elle a fui un passé sombre, traîne des cicatrices invisibles et fait tout, vraiment tout, pour protéger ses enfants. Quitte à mentir, manipuler ou pire. Ginny (formidable Antonia Gentry), quant à elle, est en pleine crise identitaire, tiraillée entre ses origines, son besoin de liberté et sa peur de devenir comme sa mère.
Ce duo central est le cœur battant de la série. Un cœur qui saigne souvent, mais qui reste vaillant.
Ce qui frappe dès les premiers épisodes, c’est la richesse de l’écriture. Ginny & Georgia jongle avec brio entre les registres : comédie, drame, thriller, satire sociale… Sans jamais perdre son cap. Chaque épisode explore des émotions profondes : la culpabilité, le deuil, la honte, la peur de l’abandon, la quête d’amour. Et le plus fort, c’est que ces émotions ne sont pas réservées aux ados. Les adultes aussi se débattent, se plantent, se relèvent.
La série met en lumière un point rarement abordé avec autant de justesse : la difficulté qu’ont les générations à se comprendre. Les ados ne saisissent pas les traumas des adultes. Les adultes ne voient pas toujours la douleur de leurs enfants. Chacun regarde l’autre à travers ses propres filtres. Et parfois, ces filtres déforment tout.
Parlons de lui. Marcus. Le garçon silencieux, énigmatique, au regard souvent fuyant. Dans la saison 2, sa dépression devient un arc narratif central. Et quel arc. Rarement la détresse mentale aura été dépeinte avec autant de pudeur et de vérité. Marcus ne va pas bien. Il s’isole, il s’éteint à petit feu, et personne ne semble vraiment voir ce qui se passe. Ni Ginny, ni sa sœur Maxine, ni même ses parents. Et c’est peut-être ça, le plus glaçant : la solitude absolue dans laquelle il s’enfonce.
Sa détresse, son mal-être, son silence… ils résonnent comme un cri étouffé. Celui de tous ceux, jeunes ou vieux, qui sourient pour faire illusion, mais qui tombent dès que les lumières s’éteignent.
Et si l’on renversait la table ? Si ce n’était pas Ginny, ni Georgia, mais Maxine, la meilleure amie, la sœur, l’amoureuse tourmentée, la volcanique, qui était la véritable héroïne de la série ? Maxine (jouée avec une énergie folle par Sara Waisglass) incarne cette génération qui revendique tout, qui ressent tout, qui refuse les cases mais s’y cogne quand même.
Elle est parfois insupportable, souvent touchante, toujours entière. Elle vit à fond, parle trop, aime mal, mais aime fort. Elle est le reflet d’une adolescence en surchauffe, mais aussi d’une humanité en perpétuelle quête de sens.
Maxine, c’est nous. Trop tout, jamais assez. Mais toujours vraie.
Avec plus de 500 millions d’heures de visionnage sur Netflix, Ginny & Georgia est un carton mondial. La série a trouvé son public, chez les ados bien sûr, mais aussi chez les parents, les grands, les trentenaires en crise, les quarantaines nostalgiques, et même au-delà. Elle touche parce qu’elle ne triche pas.
La relation mère-fille est au centre, mais autour gravitent mille autres histoires : l’amitié, le harcèlement scolaire, le racisme ordinaire, l’automutilation, le mensonge, la justice et l’injustice… Chaque personnage a droit à son moment de lumière. Personne n’est entièrement bon ou mauvais. Tout le monde est un peu perdu.
La saison 3, déjà disponible sur Netflix, a confirmé tout le talent des scénaristes à nous embarquer dans un tourbillon d’émotions. Elle pousse encore plus loin les relations, bouscule les certitudes, et laisse les fans à bout de souffle… mais conquis.
Quant à l’avenir de Ginny & Georgia, bonne nouvelle : une saison 4 est bel et bien annoncée. Si sa production n’a pas encore été officiellement datée, on sait déjà qu’elle devra répondre à de nombreuses attentes laissées en suspens. Et si l’on se fie à la montée en puissance narrative des dernières saisons, on peut s’attendre à une suite encore plus intense.
Mais quoi qu’il arrive, Ginny & Georgia a déjà laissé une empreinte forte dans le cœur de ses spectateurs. En trois saisons, la série a su tisser une toile émotionnelle universelle, entre rires et larmes, entre générations qui s’aiment sans toujours se comprendre. Elle nous rappelle, avec une sincérité bouleversante, que parfois, aimer suffit. Même quand on ne sait pas toujours comment s’y prendre.
Écrit par: Maurizio Iulianiello
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