Joseph, le nouveau roman graphique de Marion Canevascini : un récit sensible sur la transidentité

Une autrice fribourgeoise reconnue

L’autrice et artiste fribourgeoise Marion Canevascini s’est déjà fait un nom dans le monde littéraire et artistique grâce à des œuvres comme Notre Frère, Sable Mouvant ou encore Master Crêpes. Avec son nouveau projet, Joseph, elle poursuit son exploration du roman graphique en proposant un récit d’une rare sensibilité. Ce livre retrace le parcours d’un jeune homme trans, de son enfance jusqu’au moment où il devient Joseph.

À travers des illustrations empreintes de délicatesse, Marion Canevascini livre un regard intime sur la transidentité, sans chercher à théoriser ou à polémiquer, mais en plaçant l’expérience humaine et l’empathie au cœur de son œuvre.

Une histoire inspirée d’une rencontre marquante

L’idée de Joseph est née d’une rencontre inattendue. Lors d’une journée portes ouvertes dans une école, Marion Canevascini découvre un petit travail artistique réalisé par un élève. Ce projet la bouleverse profondément. Elle décide alors de contacter ce jeune homme, sans savoir s’il accepterait de partager son histoire.

Contre toute attente, il se montre enthousiaste et accepte de témoigner. De leurs échanges naît un récit qu’elle transforme en roman graphique. Le prénom de Joseph a été choisi pour préserver l’anonymat de la personne concernée.

Cette démarche s’inscrit dans une volonté de respect et de discrétion. Marion Canevascini insiste : il ne s’agissait pas de tout dévoiler ni de forcer la parole. Elle a recueilli ce qui lui était confié, sans intrusion, et a choisi de condenser l’essentiel dans une narration visuelle forte.

Pourquoi le choix du roman graphique ?

Depuis plusieurs années, Marion Canevascini explore le roman graphique comme médium privilégié. Selon elle, l’association du texte et de l’image permet de toucher le lecteur différemment : « Avec l’image, on apporte un aspect plus émotionnel, on permet au lecteur de se mettre dans la peau de quelqu’un. Cela parle à la tête, mais aussi au ventre », explique-t-elle.

Cette volonté de miser sur la force de l’image se traduit par un style narratif volontairement épuré : peu de texte, beaucoup d’illustrations. Le dessin devient le vecteur principal de l’émotion, rendant l’histoire accessible au-delà des mots.

Le communiqué de presse insiste également sur cette dimension : « Plus que par les mots, c’est surtout par la puissance et la délicatesse des illustrations que l’histoire se déploie. »

Lou, devenu Joseph : une trajectoire intime et universelle

Joseph ne se limite pas à raconter une transition de genre. Le livre suit le parcours de Lou, de l’enfance jusqu’au moment où il devient Joseph. Ce récit met en lumière les étapes intérieures d’une prise de conscience identitaire et les questionnements liés à l’écart entre genre assigné à la naissance et ressenti profond.

Plutôt qu’un discours militant, l’autrice choisit une approche sensible et humaine. Le but n’est pas de convaincre, mais de faire ressentir, de permettre au lecteur de se glisser dans une expérience de vie autre que la sienne. Cette approche offre une perspective universelle : chacun peut se reconnaître dans ce besoin de cohérence entre identité intime et regard des autres.

Un processus de création fondé sur la confiance

Pour bâtir ce roman graphique, Marion Canevascini a multiplié les rencontres avec le jeune homme qui a inspiré son récit. Au total, seulement quatre ou cinq rendez-vous ont suffi, chacun marqué par un cadre clair : anonymat garanti et respect des limites posées.

L’autrice s’est ensuite appuyée sur ces fragments de témoignages pour créer une narration linéaire, transposant certains éléments pour préserver l’intimité de la personne. L’objectif était de livrer un récit fidèle tout en respectant la confidentialité et la fragilité du vécu partagé.

Ce travail de condensation et de transposition illustre la démarche d’une autrice attentive, refusant l’intrusion, mais soucieuse de transmettre l’essence d’une expérience singulière.

Une œuvre pour développer l’empathie

Avec Joseph, Marion Canevascini ne cherche ni la provocation ni la polémique. Son intention est avant tout pédagogique et empathique.

« Si on arrive à se mettre à la place de quelqu’un, on est beaucoup moins jugeant », souligne-t-elle.

Elle espère que des lecteurs parfois hostiles ou déstabilisés par les questions de transidentité liront ce roman graphique. Pas pour changer d’avis à tout prix, mais pour faire l’effort de se mettre un instant à la place d’autrui.

Dans un contexte où les minorités, et particulièrement les personnes transgenres, sont encore souvent victimes de rejet ou d’incompréhension, ce livre propose un pas de côté salutaire. Lire Joseph, c’est accepter d’ouvrir une fenêtre sur une réalité vécue, sans jugement préalable.

Un vernissage à Fribourg

Le roman graphique Joseph sera présenté lors d’un vernissage le jeudi 2 octobre à 17h30 à la librairie L’Art d’aimer, à Fribourg.

L’autrice confie attendre ce moment avec curiosité et humilité : « Ce n’est pas mon histoire, mais celle de quelqu’un d’autre que j’ai voulu transmettre avec authenticité et respect. Je ne sais pas comment le livre sera accueilli, mais j’espère que ce sera surtout une fête et un moment de partage. »

Au-delà de l’événement, Joseph s’impose déjà comme une œuvre qui compte, tant pour son sujet que pour son approche artistique.

Un roman graphique qui mérite une large audience

Joseph n’est pas seulement un témoignage sur la transidentité. C’est aussi un roman graphique qui interroge notre capacité d’écoute et d’ouverture. Par son choix de privilégier l’image, Marion Canevascini invite à ressentir avant de juger, à observer avant de se prononcer.

Cet ouvrage a toute sa place dans les bibliothèques de celles et ceux qui s’intéressent aux récits de vie, aux romans graphiques de qualité et aux thématiques sociales actuelles. Accessible, sensible et humain, il s’adresse aussi bien aux amateurs de bande dessinée qu’aux lecteurs désireux de mieux comprendre des réalités encore trop méconnues.